Saturday, November 24, 2018

La visite du groupe “Nepsis”*.


Entre le 20-21 Novembre 2018, à l’occasion de la fête de “l’Entrée au temple de la Très Sainte Mère de Dieu”, la communauté de la famille de la Sainte Trinité, Douma, Liban, eu la bénédiction de recevoir un groupe de jeunes de l’association “Nepsis”, de l’archidiocèse Roumaine en France, accompagné par son Éminence Monseigneur Joseph (Pop),  son Excellence Monseigneur Marc (Alric), et Père Julian (Nistia), au cadre de leur pèlerinage au Liban.
Avec grande joie nous désirons partager avec nos lecteurs les paroles bénies qui ont été prononcées à l’occasion.
Son Éminence Monseigneur Joseph 
au réfectoire du Monastère 
Saint Jean-Baptiste avec les membres 
de la communauté et les membres du groupe “Nepsis”.


Parole du Monseigneur Joseph Pop à la communauté,
Au réfectoire du monastère.
20 Novembre 2018.

Ce moment que nous vivons maintenant, on le doit je pense, si l’on regarde l’histoire de chacun de nous, à Saint Silouan. Ce qu’a fait venir Mère Mariam en France dans le temps c’était Saint Silouan. Ce qu’a fait venir par exemple Monseigneur Marc en France c’est Saint Silouan… Peut-être que ce qui nous a fait nous, ou moi venir en France c’était aussi Saint Silouan. Par interposition, pour Mère Mariam s’est interposé Père Sophrony et en France il y avait toute cette fraternité monastique qui se tissait entre l’Angleterre, entre le monastère de Père Sophrony, le monastère de Bussy, le monastère Saint Silouan, et par la suite ce monastère de Saint Jean-Baptiste ici au Liban. On évoquait avec Mère Mariam le fait que c’est incroyable comment des peuples Orthodoxes entiers sont solidarisés autour de Saint Silouan au 20ème  et au 21ème siècle.
Quand j’étais étudiant, il y a assez longtemps, au monastère de Maldon. On est arrivé atterris de pays Orthodoxes avec une langue unique, et on ne connaissait pas les autres et on voyait tout d’un coup et on en entendait parler au moins une dizaine de langues autour de nous. On voyait des Suisses, des Anglais, des Allemands, des Français, des Belges, des Américains, des Égyptiens, des Russes, de partout… Au monastère, la liturgie devait comprendre pas seulement l’anglais mais ils priaient dans toutes les langues, n’en parlons pas de la prière de Jésus, quant il y avait la prière de Jésus on passait par le finlandais, le roumain, l’arabe, le grec, le russe, l’anglais… Chacun disait dans sa langue, et on s’est rendu compte que cette manière de faire les choses a tellement solidarisé et a tellement ouvert les portes entre les Orthodoxes parce que ce qui était difficile c’est que nous vivions chacun dans notre propre coin et on pensait que personne n’est plus Orthodoxe que nous-mêmes, personne. Nous sommes les meilleurs Orthodoxes et souvent quand les autres Chrétiens venaient on pensait qu’il n’y a pas de meilleurs Chrétiens que nous autres Orthodoxes. Et on se réveillait, ou en effet s’éveillait avec des Chrétiens qui ne se disaient pas Orthodoxes mais qui priaient mieux que nous les Orthodoxes. Ils connaissaient souvent, la théologie, la prière du cœur, la prière de Jésus mieux que nous…
Tout ça à l’époque quand j’étais jeune étudiant, m’a ouvert tout d’un coup un monde Orthodoxe que je ne connaissais pas, c’était comme une sorte de brouillard qui a était enlevé de nôtres têtes, même si on était en quelque sorte préparé à voir les autres. Les années d’après on faisait des pèlerinages qui partaient de France avec des jeunes du monde entier, du monde Orthodoxe… et on se retrouvait surtout en Roumanie en visitant les monastères et on a commencé aussi à chanter dans toutes les langues et voir les réactions des moines et des moniales surtout quand ils voyaient des dizaines de jeunes chantant dans plusieurs langues, dire le “Notre Père” dans différentes langues… Tout ça faisait qu’on sortait de soi-même, de sa propre maison, de son propre paradis, parce que certains disent : “Taisez-vous c’est le paradis des Grecs, ça c’est le paradis des Russes, Roumains, Catholiques, des Protestants”… Ça ouvrait en quelques sortes beaucoup de portes entre nous les Orthodoxes même si en Occident nous vivons, nous sommes très mélangés et même ici le groupe qui est là…
Autour de la canne de Père Sophrony.
De gauche à droite: Père Thomas, Monseigneur Joseph,
 Monseigneur Antonios, Mère Mariam, Monseigneur Marc.

On doit énormément à l’ouverture que le Père Sophrony a faite en Occident par son arrivée et par le monastère qu’il a ouvert. Chassé de France en Angleterre, et la brèche qu’il a fait et ouvert. C’était quelque chose de prophétique. Quand on est chassé de quelque part, nous dramatisons les choses, mais souvent il y a un appel de Dieu qui se manifeste comme ça. Dieu te fait sortir de ton propre pays, de ce que tu aimes et tu ne voudrais pas lâcher d’entre tes mains, et Il t’envoie quelque part où tu es un étranger. Qui sont les étrangers?. Les Libanais le savent bien, parce qu’il y a des millions à travers le monde, comme les Russes, les Grecs, les Roumains… Quand on est étranger on a plus d’attention et de sensibilité et on peut dire qu’on prie mieux puisqu’on ne peut pas se fier à qui que se soit. On n’a pas d’aide humaine, pas de frères, pas de sœurs… On se fie à Dieu Lui-Seul, et notre seule espérance c’est là-haut. Notre seule espérance est Dieu. Quand nous sommes tous ensembles, nous sommes bien enracinés dans ce monde, mais quand on est étranger on na personne, seulement nous et Dieu!. Pour cela Dieu est nommé dans plusieurs endroits de l’Ancien Testament surtout Il est le Dieu des étrangers, dans les psaumes surtout, Il est le Dieu de la veuve est des orphelins… Pour cela Il est le Dieu des étrangers, puisque l’étranger a une sorte de sensibilité envers Dieu que personne d’autre ne l’a.
Je me rappelle quand j’ai vu Mère Mariam pour la première fois en France, en 1995 à Bussy, elle nous a parlé de la guerre au Liban, et comment les Chrétiens Libanais ont échappés à cette guerre. Ils étaient très peu nombreux, entourés par des ennemis  tout au tour, mais au bout de certain temps on a apprit à faire la paix. Une fois j’étais au parlement Européen, on a dû parler avec un Imam, un Rabbin, un évêque Catholique, un pasteur Protestant… On a dû parler de la paix, comment les peuples vivent. On a dit chacun ce qu’on a pu dire, moi j’ai donné un exemple. On avaient une sorte de pièce de théâtre en Roumanie qui s’appelait “Take yanke Chi ka Dur”, c’était un Orthodoxe, un Juif, un Musulman, qui vivaient tout les trois dans la même rue et ils faisaient du commerce. Ils devaient s’entendre mais au moment où la fille du Juif devait se marier avec le fils du Chrétien Orthodoxe toute l’amitié est tombée, on est ami mais on ne se mélange pas. Il y avait le Rabbin à côté de moi, on continuait à parler de la paix, je lui chuchotais et j’ai dit : “Monsieur le Rabbin, la paix est la chose qui se gagne avec beaucoup de guerre”. Il a dit :“ Comment?!”. En effet si on ne se fait pas la guerre à soi-même on ne peut jamais atteindre la paix.
L’expérience de la prière que vous avez ici, qui a accompagné la guerre qui a eu lieu au Liban, cette prière a sauvé le Liban, carrément le Liban a été sauvé par la prière des Chrétiens. Quand j’étais au Parlement Européen, j’entendais les témoignages des politiques Libanais, comme on avait mal à vivre à l’époque. Le cri du Liban était : Écoutez nous sommes submergés, aidez-nous, et ils criaient cela auprès des peuples Chrétiens: “Qu’est ce que vous voulez qu’on fasse nous?. Nous avons résisté jusque là, mais maintenant nous ne savons pas qu’est ce qu’on va faire?!”...
Je pense que ce qui nous sauve c’est cette prière discrète dans les montagnes toujours dans les montagnes, une prière à laquelle Dieu Lui-même s’accroche pour nous sauver. Souvent Dieu s’accroche à notre prière pour nous sauver. Quand Elie  a reproché à Dieu que lui seul est resté le meilleur, le plus juste, le plus croyant de tous… Dieu lui a dit : “Tais-toi, parce qu’il y a des milliers d’hommes, 7 milles qui n’ont pas fléchis les genoux devant les idoles”.
Dans ce monde où nous vivons, nous les Chrétiens nous sommes nostalgiques des empires. Olivier Clément disait que nous ne sommes pas là pour ça, nous sommes, “le sel de la terre”. S’il y en a trop de sel on ne peut pas manger, si on n’a pas de sel on ne peut pas manger. Le sel est ce qui donne le juste goût de la nourriture et pour nous il disait que si on avait une sorte de blessure, le sel ne laisse pas les blessures se refermer. Il disait que le Chrétien est un prophète, qui par son attitude, par sa prière, et par sa vie, ne laisse pas se refermer cette plaie que Dieu a fait dans le monde, dans l’humanité par Son Incarnation, et par Sa présence parmi nous les humains.
Ce pays le Liban, moi je ne suis jamais venu mais il est plongé dans l’histoire du commencement du Christianisme et pas seulement des commencements de la vie Biblique. On est tout près des endroits où avons passé probablement aussi beaucoup de prophètes, et aussi Le Seigneur.
Nous vous remercions Mère Mariam pour ce témoignage extraordinaire, modeste, et humble, que vous donnez ici au Liban au milieu de peuples qui ne sont pas toujours Chrétiens et même les Chrétiens… Nous sommes fiers quand on dit dans un pays Orthodoxe que nous sommes 90% Orthodoxes... Ah, c’est extraordinaire!. Mais quand on gratte un tout petit peu, on voit que nous ne sommes pas où nous devons être avec notre foi. Si on est humble, on prit le Seigneur comme si on ne l’était pas. Je connais un prêtre qui dit :“ Je n’ai pas la foi, mais je me comporte comme si je l’ai, je n’ai pas la foi mais je pris comme si j’avais la foi”. Il le disait d’une manière tellement appuyée qu’on avait envie de le croire. Quand on dit qu’on prit comme si on n’a pas la foi c-à-d on prie comme des désespérés, puisque ma seule espérance ou mon seul espoir, est celui en Qui je dois croire mais je crois très peu.

Groupe “Nepsis” au Monastère Saint Jean-Baptiste,
Douma, Liban.


*Groupe “Nepsis” :
NEPSIS est une association de jeune qui a pris naissance au sein de la Métropole Orthodoxe Roumaine d’Europe Occidentale et Méridionale (MOREOM) en 1999.
Le terme “nepsis” vient du grec et signifie “état d’éveil”. C’est un terme couramment utilisé par les ascètes et se réfère à un état de l’esprit, de la conscience, de l’âme. L’être humain est appelé à toujours être vigilent face aux choix qu’il est amené à faire dans la vie de tous les jours, face aux hommes qui l’entourent, face à la vie en général.
Ainsi les jeunes sont encouragés à ne jamais “s’endormir” spirituellement et d’investir toute leur énergie physique dans des actions leur donnant un repos de l’esprit.
Il existe plusieurs “niveaux Nepsis” dans NEPSIS MOREOM : au niveau national, de chaque pays représenté, au niveau régional et paroissial.