Père
Lev Gillet : Prêtre et théologien
orthodoxe français. Catholique de naissance, il fut reçu dans l’Église orthodoxe à Paris en
mai 1928, par Mgr Euloge, responsable de l'Église russe en
Europe occidentale, et en novembre 1928 il devient le recteur de la
paroisse Sainte-Geneviève-de-Paris, la première paroisse orthodoxe francophone.
En 1938, il quitte Paris pour s’installer à Londres, dans un premier temps
dans le cadre d'un foyer s'occupant de jeunes réfugiés juifs et judéo-chrétiens
de l'Europe centrale puis dans le cadre du Fellowship of Saint Alban and Saint
Sergius, organisme œcuménique voué au rapprochement entre l’Église anglicane et
l’Église orthodoxe. Il reste en Angleterre jusqu’à son décès, faisant de
nombreux voyages à l’étranger, notamment en France, en Suisse et au Liban, où
il participe au renouveau spirituel de l’orthodoxie antiochienne.
Jésus, pour
s'arrêter au puits de Jacob, choisit l'heure où il sait que la Samaritaine
viendra puiser son eau de chaque jour. C'est dans nos besoins quotidiens, -
dans nos corvées quotidiennes, - que Jésus veut nous rencontrer.
« Va et
appelle ton mari ... » Jésus était en train d'exposer à la Samaritaine le
mystère de l'eau vive. Et voici qu'il interrompt son discours d'une manière en
quelque sorte abrupte et met la Samaritaine en demeure de révéler la plaie de
sa vie. La Samaritaine se borne à un demi-aveu balbutiant. Jésus va lui-même
préciser les choses. Il met le doigt sur la plaie et la débride: les cinq maris
successifs, le concubinage présent...
Jésus ne
laisse pas longtemps se poursuivre son dialogue avec nous sans en venir à nos
réalités immédiates. Il nous interroge sur nos blessures secrètes. Nous
préférerions peut-être rester sur le terrain des idées et entendre Jésus
développer une doctrine, un message « général ». Mais Jésus coupe court: « Va
chercher ton mari ... »
Jésus veut
tellement mettre le péché en pleine lumière qu'il ne dit pas au paralytique de
Capernaum: «Sois guéri! », mais: «Mon enfant, tes péchés te sont pardonnés ».
Là où l'on
s'attendrait peut-être à ce que Jésus parle de réforme sociale et
d'améliorations matérielles, Jésus nous parle de péché, de repentance, de
pardon. Certes, l'adhésion totale à l'évangile implique, nécessite les réformes
extérieures. Mais, qu'il s'agisse des problèmes de la maladie, du travail, de
l'oppression et de la justice économiques, et même du logement, le péché est
là, à l'arrière-plan. La libération vraie est liée à la conversion.
Plus je
croîtrai dans la connaissance de Jésus, plus je verrai que tout ce qui, dans
ma
vie, semble incident ou accident physique est lié de quelque manière au péché,
soit originel, soit personnel. C'est le texte entier de ma vie que je lirai et
interpréterai autrement, selon que je serai convaincu, ou non, de la réalité,
de la gravité du péché.
Jésus et la Samaritaine.
Catacombe Via Latina, Italie.
|
Le
douloureux échec de certains mouvements chrétiens d'aujourd'hui ne provient-il
pas de ce qu'on ne mentionnait jamais le péché, - en le nommant «péché»? Ce
n'est pas ainsi que parlait Jésus.
Par une
simple phrase, Jésus guérit le paralytique qui ne pouvait descendre dans la
piscine de Bethesda aux temps où l'ange en agitait les eaux. Ce qui se passait
à Bethesda, lors de la venue de l'ange, représente la dispensation régulière -
et en quelque sorte officielle - de la grâce. Mais Jésus ne cesse de
s'approcher des hommes et de guérir directement, immédiatement ceux qui ne
peuvent se plonger dans les eaux de Bethesda. Et cela ne signifie pas qu'on
doive ignorer ou mépriser Bethesda. Mais Jésus n'est lié par rien. A lui tout
est possible, sans conditions préalables.
« Et moi
cependant, je suis au milieu de vous, comme celui qui sert ». Je n'atteindrai
pas Jésus si je le cherche régnant, à la place d'honneur. Je dois le chercher
et le découvrir là où il se cache, à la dernière place, dans ses membres
souffrants et humiliés. C'est parce qu'ils ne le cherchent pas là que tant
d'hommes ne « peuvent pas croire» en lui ou n'ont en lui qu'une foi nominale.
Zachée doit descendre de son sycomore pour rejoindre Jésus dans la foule.
Lavement
des pieds, le soir de la cène. Le quatrième évangile note avec soin chaque
détail de cet épisode. Nous voyons Jésus se lever, quitter sa tunique, se
ceindre d'un linge, verser de l'eau dans un bassin, laver les pieds des
disciples, enfin les essuyer. Jésus sert, et il sert de la manière la plus
parfaite. Rien de ce qu'il faut n'est omis. Attention due et donnée aux petites
choses.
Marie de
Magdala aime Jésus, semble-t-il, plus encore que ne l'aiment les disciples
eux-mêmes. Jésus avait chassé d'elle sept démons. Le Sauveur occupe l'âme de
ceux qui l'aiment, il t'occupe avec d'autant plus de force que ces âmes ont
jadis pu s'ouvrir à plus d'influences hostiles. Ame qu'ont peuplée les démons,
prends courage.
Si, entre
les paroles de Jésus, j'avais à en choisir une, une seule, qui pût résumer pour
des incroyants toute la bonne nouvelle, je choisirais sans hésiter ces mots :
«Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous soulagerai».
Humanisme?
Non, car il s'agit de voir qui ose parler ainsi.
“Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés...”
Mercredi Saint au monastère Saint Jean Baptiste, Douma, Liban.
|
Mon
Sauveur, je vois l'immense masse souffrante, écrasée sur le sol; je la vois
tendre les bras vers toi, se traîner, se lever, essayer d'aller à toi en
tâtonnant, en titubant. Tu les attires sans qu'ils te connaissent. En toi, ils
pressentent celui qui guérit, celui qui console, celui qui pardonne.
Jésus, simples regards sur le sauveur, Père Lev Gillet,(1962).