Saint Ambroise. |
“Thècle” apprenne les vierges à
s’offrir en sacrifice. Fuyant les liens du mariage, condamnée par la fureur de
son fiancé, elle changea la nature même des bêtes féroces qui respectèrent sa
virginité. Livrée aux bêtes, celle qui se dérobait aux regards mêmes des hommes
s’exposait à un lion féroce, et contraignit ceux qui jetaient sur elle des regards
impudiques à les changer en regards de pudeur.
On put voir, en effet, la bête se
coucher à terre, lui lécher les pieds, témoignant en un langage muet qu'elle ne
pouvait porter atteinte au corps sacré d'une vierge. Le fauve donc se
prosternait devant sa proie, et, oublieux de son propre naturel, revêtait la
nature que les hommes avaient rejetée.
On pouvait comme assister à un échange des natures: les hommes, devenus sauvages, exciter la férocité de l'animal; celui-ci, caressant les pieds de la vierge, montrer comment les hommes auraient dû se comporter. Telle est l'admiration qu'inspire la virginité que les lions mêmes admirent. Ils étaient affamés: la proie ne les tenta pas, leur passion ne les emporta pas, la rage ne leur fut pas un aiguillon, leurs instincts habituels ne les égarèrent point, leur naturel féroce ne prit pas le dessus. Ils enseignèrent un respect religieux en vénérant la martyre, ils donnèrent aussi une leçon de chasteté en ne baisant que les pieds de la vierge, les yeux baissés, comme par pudeur, pour qu'aucun mâle, même parmi les bêtes, ne regardât le corps d'une vierge!.
On pouvait comme assister à un échange des natures: les hommes, devenus sauvages, exciter la férocité de l'animal; celui-ci, caressant les pieds de la vierge, montrer comment les hommes auraient dû se comporter. Telle est l'admiration qu'inspire la virginité que les lions mêmes admirent. Ils étaient affamés: la proie ne les tenta pas, leur passion ne les emporta pas, la rage ne leur fut pas un aiguillon, leurs instincts habituels ne les égarèrent point, leur naturel féroce ne prit pas le dessus. Ils enseignèrent un respect religieux en vénérant la martyre, ils donnèrent aussi une leçon de chasteté en ne baisant que les pieds de la vierge, les yeux baissés, comme par pudeur, pour qu'aucun mâle, même parmi les bêtes, ne regardât le corps d'une vierge!.
Ainsi l'on n'écarte pas la fleur
de l'âge, mais on examine les dispositions. A coup sûr Thècle n'a pas été
recommandée par son âge, mais par sa vertu. Et pourquoi nous attarder davantage
sur ce sujet, puisque tout âge est apte devant Dieu, parfait aux yeux du
Christ? Aussi bien nous déclarons que ce n'est pas la vertu qui dépend de
l'âge, mais l'âge de la vertu. Ne vous étonnez pas de cette résolution chez des
adolescentes, quand vous lisez que des enfants furent martyrs. Il est écrit: «
De la bouche des enfants et des nourrissons, vous avez recueilli la louange» (Ps
8,3). Doutons-nous que l'adolescence puisse le suivre jusqu'à la continence,
alors que l'enfance le confesse jusqu'à la mort ? Il nous semble incroyable que
des filles nubiles suivent le Christ vers son Royaume, alors que les enfants
eux-mêmes l'ont suivi au désert?. Car nous lisons que cinq pains ont rassasié
quatre mille hommes « sans compter, est-il dit, les enfants et les femmes» (Mt
14,21).
Sainte “Thècle” |
La vierge qui cherche le Christ
ainsi, celle qui trouve le Christ, peut dire: « Je le tiens et ne le lâcherai
pas que je ne l'aie introduit dans la demeure de ma mère, dans la chambre de
celle qui m'a conçue. » (Cl 1,4) Quelle est cette demeure de ta mère et sa
chambre, sinon l'intime retraire de la nature?. Garde cette demeure, purifie
l'intérieur de cette demeure. Lorsque la demeure sera sans tache, non souillée
par les taches quelconques d'une fausse conscience, elle s'élèvera, scellée sur
la pierre d'angle, comme une demeure spirituelle, comme un sacerdoce saint, et
l'Esprit-Saint y habitera (Ep 2,20-22 ; l P 2,5). Celle qui cherche ainsi le
Christ, qui l'implore de la sorte, n'est pas délaissée par lui; au contraire,
il la visite souvent, puisqu'il est avec nous jusqu'à la fin du monde (Mt
28,20).
Voilà donc le Christ trouvé et
possédé; voilà trouvé celui qui a passé la main par la fenêtre (Cl 5,4). Quelle
est cette fenêtre à nous, sinon celle à travers laquelle nous voyons les
ouvrages du Christ, l'œil de l'âme, le regard de l'esprit?. Que le Christ, ô
vierge, entre donc par ta fenêtre!. Que le Christ passe la main à travers le
treillis!. Que le Christ vienne à toi et non pas un amour charnel !. Si donc le
Verbe de Dieu passe la main à travers ta fenêtre, vois comment préparer tes
fenêtres, vois comment tu dois les purifier de toute la poussière des fautes.
La fenêtre d'une vierge ne doit avoir aucune obscurité, aucune fausseté. Loin
d'elle la teinture et les autres vanités d'une beauté empruntée, loin d'elle
les appâts d'un amour adultère!. De même pour la clôture des oreilles: il n'y
faut pas suspendre des fardeaux en leur faisant des blessures. Il n'est qu'un
seul ornement: écouter ce qui est utile.
Ta porte aussi, sache la
verrouiller aux heures de nuit, qu'on ne la trouve pas aisément ouverte.
L'Époux lui-même la veut fermée quand il frappe. Notre porte, c'est notre
bouche: elle ne doit guère s'ouvrir qu'au seul Christ et ne s'ouvrir qu'après
que le Verbe de Dieu aura frappé. C'est d'ailleurs pour cela qu'il est écrit: «
Un jardin clos, voilà ma sœur et épouse; un jardin clos, une fontaine scellée »
(Ct 4,12), pour qu'elle n'ouvre pas facilement la bouche et ne s'abaisse pas à
des paroles vulgaires. Car, même sur les choses de Dieu, il ne te sied pas de
répondre si le Verbe de Dieu ne t'interroge pas. Alors quelle retenue ne te
faut-il pas avec les autres!. Parle au seul Christ, converse avec le seul
Christ.
Si la porte d'Ève avait été fermée, Adam n'eût
pas été trompé et elle n'aurait pas répondu aux questions du serpent (Gn 3,2
s.). La mort est entrée par la fenêtre (cf Jr 9,21), j'entends par la porte,
d'Ève. La mort entre par ta porte si tu dis des faussetés, si tu as des paroles
honteuses, effrontées, ou déplacées. Que les battants de tes lèvres soient donc
clos, que le vestibule de ta voix demeure verrouillé! Alors peut-être
faudra-t-il le déverrouiller quand tu entendras la voix de Dieu, quand tu
entendras la parole de Dieu.
Sainte “Thècle” entre dans le rocher. |
C'est alors que la myrrhe suintera
pour toi (Ct 5,5), c'est alors que la grâce du baptême soufflera sur toi, pour
te faire mourir aux choses du monde avec le Christ et ressusciter avec le
Christ. “Qu'avez-vous encore, est-il dit, à juger comme si vous étiez de ce
monde?. Ne touche pas, n'aie pas de contact, ne goûte pas à ce dont l'usage
mène à la corruption. » (Col 2,20 s.)29. La corruption doit être étrangère aux
chastes : ensevelis donc le soin de la chair et du monde. “Ressuscités avec le
Christ, recherchez les choses d'en haut, où est le Christ. » (Col 3,1). En
cherchant le Christ, tu vois Dieu le Père, car le Christ trône à la droite de
Dieu.
L'Apôtre t’interdit le commerce
avec la terre et, dépassant presque les limites de la nature, t'enseigne à
t'envoler vers le ciel sur les ailes de l'Esprit : “Ayez, dit-il, le goût des
choses d'en haut, non de celles de la terre.” (Col 3,2). Mais c'est chose
impossible tant qu'on est enfermé dans ce corps comme en une clôture; et à la
mort du corps, l'âme, nous dit-on, reprend son vol vers les hauteurs, enchaînée
qu'elle était pendant notre vie par la loi de notre nature. Il ajoute : “Car
vous êtes morts, et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu. » (Col 3,3).
Si elle est cachée avec le Christ en Dieu, qu'elle ne se montre pas au monde; car
le Christ est mort au monde et vit pour Dieu.
Vois maintenant comment le Christ
aime être désiré, lui qui, n'aime pas les bavardages. Donc cette vierge a
ouvert sa porte au Verbe de Dieu ; mais, dit-elle, “il était passé et mon âme
est sortie sur sa parole » (Cl 5,6) : sortie du monde, sortie du siècle
demeurant dans le Christ. “Je l’ai cherché, dit-elle, et ne l’ai pas trouvé”.
Car le Christ aime qu’on le cherche longtemps.
Référence :
Écrits sur la virginité. Saint Ambroise.(1980).