Mgr. Basile (Krivochéine) |
Mgr. Basile (Krivochéine), archevêque de Bruxelles
et de Belgique, est l’un des prélats les plus marquants dans
l’histoire de l’Eglise Orthodoxe Russe de la deuxième moitié
du XX siècle. Ayant prononcé ses vœux – sous le nom de Basile – au
monastère russe de Saint-Panteleimon, il y demeurera vingt-deux ans, dans
l’ascèse, la prière et le travail, notamment administratif (en tant que
secrétaire du monastère). Après la Seconde guerre mondiale, le contexte de la
guerre civile grecque forcera cependant des moines russes – dont Basile
Krivochéine – à quitter le Mont Athos. Invité à participer au Patristic
Greek Lexicon édité à Oxford par le professeur Lampe, l’ancien athonite
s’installera dans cette ville, où il sera ordonné prêtre. Basile Krivochéine
est appelé à l’épiscopat dans l’Église russe. Sacré à Londres le 14 juin 1959,
il sera d’abord évêque auxiliaire à Paris, puis archevêque diocésain à
Bruxelles à partir de 1960.L’archevêque Basile contribuera au développement de
l’Église orthodoxe en Belgique et aux Pays-Bas. Le 22 septembre 1985,
l’archevêque Basile Krivochéine sera rappelé à Dieu durant un voyage en Russie,
et inhumé dans sa ville natale. Traduites en différentes langues, plusieurs
fois rééditées, ses œuvres constituent, jusqu’à nos jours, une référence dans
le domaine des études patristiques notamment.
Saint Syméon le nouveau Théologien, au commencement de sa conversion à Dieu « récitait avec instance des
prières à la Mère de Dieu, avec gémissements et larmes». Et son grand zèle dans
les prières « attira la compassion de la Mère du Christ et par son intercession
se rendit la Divinité propice, et fit descendre jusqu'à lui la grâce de
l'Esprit. Et celle-ci (à son tour) lui donna la force d'atteindre jusqu'au Ciel
et le fit digne de voir la lumière que tous désirent et que bien peu
obtiennent. »
Saint Syméon raconte que,
tourmenté par le chagrin de ne plus voir le Christ et du désir de Le voir
encore une fois,
“un jour que j'étais allé saluer
l'image immaculée de celle qui T'a enfanté et que je me prosternai devant elle,
Toi-même, avant que je me fusse relevé, au-dedans de mon cœur misérable, comme
si Tu l'avais transformé en lumière, Tu Te fis voir; et alors je connus que je
Te possédai consciemment en moi. »
Par une intervention subite de la
Mère de Dieu dont la grâce est présente dans son image, Saint Syméon achève son
cheminement vers une possession consciente du Christ. Enfin, dans une prière au
Christ Saint Syméon met en avant le rôle de sa Mère dans l'œuvre du salut:
« Toi le seul immortel, le seul
tout-puissant, le seul bon et ami des hommes, descendant de tes saintes
hauteurs sans sortir du sein paternel, mais incarné et enfanté de Marie, Vierge
Sainte. »
Selon les écrits de Saint Syméon, ainsi que
l'Église, On ne saurait présenter le Christ et son œuvre salvatrice sans y
joindre aussi la Bienheureuse Vierge Marie, la Mère de Dieu, la Théotokos, tant
ces thèmes sont liés ensemble et constituent un tout. Commentant la création de
la première femme de la côte d'Adam, Saint Syméon dit:
« De même donc que, jadis, dans
la formation d'Ève, notre aïeule, Dieu prit la côte déjà animée d'Adam et en
bâtit une femme - telle est, en effet, la raison pour laquelle Il ne lui
insuffla pas comme à Adam un souffle de vie; mais avec la partie qu'Il prit de
la chair de l'homme Il constitua un corps de femme complet et de ce prélèvement
du souffle qu'li prit avec la chair animée Il fit une âme vivante parfaite,
réalisant avec les deux ensembles un être humain -, exactement de la même
manière, ayant pris de la Sainte Mère de Dieu et toujours Vierge Marie une
chair animée, comme levain el modeste prélèvement tiré de la pâte de notre
nature, c'est-à-dire à la fois de l'âme et du corps, Dieu, le Modeleur et le
Créateur, l'a unie à sa Divinité incompréhensible et inaccessible; ou plutôt
c'est à notre essence qu'Il unit en essence l'hypostase entière de sa Divinité;
mêlant sans confusion celle-ci à celle-là, l'humaine à la sienne propre, Il l'a
édifiée comme un temple saint pour Lui-même; sans mutation”.
Fresque au monastère Hurezi,
en Roumanie.
« De même que la portion prise du corps entier
d'Adam a été édifiée pour former une femme, de même en retour la même partie
prise de la femme est édifiée pour former un homme, et devient le Nouvel Adam,
Notre Seigneur Jésus-Christ, ... de même que la part mise en réserve,
c'est-à-dire la portion, à savoir la femme elle-même, a été à l'origine de la
malédiction qui est passée à tout le corps, à notre race, de même en retour par
l'intermédiaire de cette même part, c'est-à-dire du Corps du Maître, la bénédiction
passa à toute l'humanité». Mais après l'infidélité d'Israël, Dieu « prit de
nouveau parmi les Israélites sa portion, la part réservée, celle ... qui est
issue de la côte d'Adam; Il la prit dans la tribu de Juda et la préserva pour
Lui-même. Puisque tous les autres avaient été enfermes dans l'incrédulité,
prélevant d'abord parmi eux la part dont Il édifia une femme, c'est-à dire
Marie la tout irréprochable, puis possédant en Lui-même, comme germe de la foi
en Dieu, la chair assumée grâce à Marie la Sainte Mère de Dieu toujours Vierge,
Il l'a édifiée eu temple saint pour Lui-même, Lui, le Dieu très Saint devenu
Homme Dieu. Cependant, le Christ reste Fils d'Adam, mais du moment que cette
chair, prise de la Sainte Mère de Dieu en personne, n'était pas issue de la
femme, mais édifiée en femme à partir d'Adam, c'est Adam que le Christ est dit
porter; second Adam, issu du premier, ... car Il est Fils de Dieu et Fils, non
de la femme, mais d'Adam. »
C'est ici l'image de Marie,
Temple de Dieu qui est employée. Une autre image vétérotestamentaire
préfigurant la Mère de Dieu est l'arche de Noé, car elle contient le Christ
Incarné, comme l'arche abritait Noé et les siens:
« L'arche était. La figure de la
Mère de Dieu, et Noé, celle du Christ; et ceux qui entouraient Noé étaient les
prémices de la part réservée d'entre les Juifs, de ceux qui à l'avenir
croiraient au Christ, tandis que les animaux sauvages et domestiques, les
volatiles et les reptiles, étaient la figure des nations. En conséquence, si
l'arche, après la venue du déluge contenait Noé, Marie la Mère de Dieu
contenait l'Incarné, Dieu et homme; mais l'arche ne sauva qu'un personnage avec
sa famille, tandis que l'Incarné a préservé à la fois son arche et le monde
entier du déluge du péché, de la servitude de la loi et de la mort”.
La Mère de Dieu est aussi la
terre promise et le vase de la manne.
Saint Syméon se rappelle les
anciens Israélites et explique que ceux-ci avaient seulement les figures des
biens à venir:
« Ce peuple possédait, en effet,
la terre promise, au lieu du paradis par excellence un second paradis, l'arche
au lieu de la Mère de Dieu ... Il possédait le vase de la manne, au lieu de
l'arbre de vie qui était au milieu du paradis et dont les premiers parents
n'eurent pas la possibilité de manger; c'était une figure montrant le vase qui
devait porter en lui le Christ. Il possédait la manne, au lieu du Christ, car
c'est Lui le pain descendu des cieux et qui donne au monde la vie éternelle. »
Saint Syméon réaffirme que c'est
à l'incarnation, plus exactement à l'annonciation, quand elle donna son
consentement, que la Mère de Dieu a été libérée de la mort de l'âme qui pesait
sur Ève.
Cependant, comme il est
incontestable que Dieu le Verbe soit né de la Sainte Mère de Dieu, ainsi
peut-on dire qu'Il naît aussi des saints qui Le conçoivent spirituellement en
eux. Il y a donc deux naissances du Verbe, la corporelle et la spirituelle. Saint
Syméon examine longuement leur relation réciproque qui nous fait comprendre la
place unique de la Mère de Dieu dans l'œuvre de notre salut.
Voilà pourquoi la Vierge Marie
est en même temps la Reine des saints et leur Mère:
« la Mère de Dieu est souveraine,
reine, Dame et Mère de tous les saints; et les saints sont tous, d'une part,
ses serviteurs en tant qu'elle est la Mère de Dieu, d'autre part, ses fils en
tant qu'ils communient à la chair tout immaculée de son Fils, parole digne de
foi, puisque la chair du Seigneur est chair de la Mère de Dieu. »
Saint Syméon explique en quel
sens nous sommes ses proches:
Saint Syméon le nouveau théologien. |
« Les saints sont triplement
apparentés à la Mère de Dieu : d'une première façon, parce qu'ils tirent tous
ensemble leur origine de la même glaise et du même souffle, l'âme; deuxièmement,
parce que c'est de la chair qui a été prise d'elle qu'ils ont une part commune
avec elle; parce que enfin, à cause de la sainteté selon l'Esprit qui survient
en eux grâce à elle, chacun d'eux conçoit et possède pareillement en lui-même
le Dieu de toutes choses, comme elle Le possédait elle aussi en elle-même; car,
tout en Lui ayant donné naissance par le corps, elle Le possédait aussi
toujours en elle spirituellement et, maintenant encore, elle Le possède sans
cesse, de la même façon, inséparable d'elle » .
« Tel est le mystère des noces qu'a célébrées pour Son Fils unique le Père coéternel et égal à Lui en dignité… et Il a invité beaucoup de gens”.
Référence :
Dans la Lumière du Christ. Archevêque Basile
Krivochéine.(1980)