Saturday, October 29, 2022

Le travail de la vie.
Mère Mariam Zacca.

             

À l'aube de l'année 33 au monastère.!!.
Mère Mariam avec Saint Sophrony et Père Touma prenant
sa bénédiction pour commencer leur communauté monastique 
au Liban. 1990.


Dieu resta debout derrière la porte de chacune de nos maison, debout dans l’obscurité de la nuit, dans la chaleur du jour, dans la gelée blanche des soirées et à l’aube, disant : “Mon fils donne-moi ton cœur”(Proverbes23, 26).

Le Seigneur demande le cœur de l’homme, racine de la vie, afin de le laver par sa tendresse, de le nettoyer par son amour, d’éclairer ses ténèbres par sa lumière et de le purifier par le feu de son amour. Il demande le cœur de l’homme afin qu’il lui enseigne l’amour divin perdu lors de la chute, et Il dit : “Apprenez de moi, Je suis doux et humble de cœur”.(Matthieu11, 29), car “le cœur contrit et brisé, Tu ne le méprises jamais”.(Psaume50, 17).

Si le cœur de l’homme se donne ainsi à Dieu, le Seigneur l’exauce, car ce cœur d’homme veut se laver, se purifier, aimer Dieu et son prochain et son ennemi : il veut devenir un cœur divin, recevant cœur et amour du cœur de Dieu, et esprit de l'Esprit de Dieu. Il les reçoit par une touche de Dieu, par la grâce déversée sur lui et par son acquiescement à l'appel de Dieu. Il se livre à Dieu pour qu'Il le lave de toutes les souillures de l'âme, du corps ct de l'esprit, et qu'il devienne un réceptacle pour son Esprit très Saint, et commence à suivre le long chemin de l'amour, sa vie durant.

Cela, frères bien-aimés, n'a lieu que par la garde stricte des commandements évangéliques, au cours de toute notre vie. C'est le travail de la vie, et nul travail n'est plus noble, plus difficile et plus lumineux. Et l'amour qui nous est demandé est un amour qui nous fait sortir de notre moi étroit pour rencontrer Dieu dans le frère, le prochain et l'ami. Mais Dieu nous demande plus que cela, car il n'y a pas de limite à l'amour en Dieu. Il nous demande, après l'amour de Dieu et du prochain, l'amour de nos ennemis.

Quel est le sens du commandement du Christ: «Aimez vos ennemis? » Pourquoi le Seigneur a-t-il dit que ceux qui garderaient ses commandements sauraient d'où provient son enseignement? (Jean 7, 17). Comment le Saint Silouane comprenait- il cela?

Dieu est Amour, Amour absolu qui, dans sa surabondance, embrasse toute la création. Dieu est présent même en enfer en tant qu'amour. En donnant à l'homme, à la mesure de sa capacité, la connaissance réelle de cet amour, le Saint- Esprit lui révèle, par là même, la voie qui mène à la plénitude de l'existence.

Ceux qui sont parvenus au Royaume des Cieux et qui demeurent en Dieu, voient dans le Saint-Esprit tous les abîmes de l'enfer, car dans l'être tout entier il n'y a pas de domaine où Dieu ne soit présent. Tout le Ciel des saints vit par le Saint-Esprit, et rien de ce qui existe dans tout l'univers n'est caché à l'Esprit Saint ». « Dieu est amour; et dans les saints, le Saint- Esprit est Amour. » (Starets Silouane ... , chapitre Des saints). Demeurant dans les Cieux, les saints voient l'enfer et l'embrassent aussi de leur amour.

“le travail”, pour restaurer le monastère de
Saint Jean-Baptiste. Douma. Liban. 

Ceux qui haïssent leur frère et le rejettent sont amputés dans leur existence. Ils n'ont pas connu le vrai Dieu, qui est Amour embrassant tout, et n'ont pas trouvé la voie qui mène à lui. (Starets Silouane ... ).

Ce commandement du Christ: « Aimez vos ennemis» est le reflet, dans le monde, du parfait amour du Dieu Trinité et constitue la pierre angulaire de tout notre enseignement. C'est l'ultime synthèse de toute notre théologie; c'est « la force d'en haut » et cette « surabondance de vie » que le Christ nous a donnée (Jean 10, 10) ; c'est ce « baptême par l'Esprit Saint et par le feu » dont parle saint Jean-Baptiste (Matthieu 3, Il). Cette parole (“Aimez vos ennemis” est le feu que le Seigneur est venu apporter sur la terre (Luc 12, 49) ; c'est cette Lumière divine incréée qui apparut aux apôtres sur le Mont Thabor; ce sont ces langues de feu dans lesquelles le Saint-Esprit descendit sur les apôtres réunis dans la chambre haute de Sion; c'est le royaume de Dieu en nous, « venu en force» (Marc 9,1) ; c'est l'accomplissement de l'être humain et la perfection de la ressemblance à Dieu (Matthieu 5,44-48).

Quelque sage, instruit et noble que soit un homme, s'il n'aime pas ses ennemis, c'est-à-dire tout être humain, il n'a pas encore atteint Dieu. Et par contre, quelque simple, pauvre et ignorant que soit un homme, s'il porte dans son cœur cet amour, «il demeure en Dieu et Dieu demeure en lui ». Aimer d'un amour compatissant ses ennemis en dehors du seul vrai Dieu, affirmait Saint Silouane, est impossible. Le porteur d'un tel amour communie à la vie éternelle, et en a dans son âme un témoignage indubitable. Il est l'habitacle du Saint-Esprit, et dans le Saint-Esprit il connaît le Père et le fils; il les connaît d'une connaissance authentique et vivifiante. Dans le Saint- Esprit, il est le frère et l'ami du Christ, il est fils de Dieu et dieu par la grâce. (Starets Silouane ... ).

Frères bien-aimés, ces paroles sont très difficiles à appliquer dans notre vie quotidienne, dans la société où nous vivons - même si notre société est monastique - ou dans le monde. Quelle est la solution?

« Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu» (Romains 3, 23).

Et la gloire de Dieu est apparue sur la Croix. C'est pourquoi l'homme doit rester sur la croix du Christ à chaque minute de la journée et de la nuit, il doit rester étendu, écartelé, sans pouvoir sur son corps, sans s'opposer à quoi que ce soit ou à qui que ce soit autour de lui; et rester ainsi suspendu sur la croix veut dire rester dans le cœur du Dieu à genoux au Golgotha, suant le sang, par amour du Père qui l'a envoyé mourir pour la rédemption des hommes.

Et nous, en acceptant d'être cloués sur la croix, nous acceptons le sacrifice de la rédemption au nom de tout ce qui nous entoure et au nom de l'humanité entière.

Je n'entrerai pas ici dans le mystère de la douleur découlant de notre crucifixion sur l'amour de nos ennemis, ni même sur l'amour de mon frère qui ne m'aime pas. Car le visage de Mon Christ est mon refuge, Son Évangile ma nourriture, Son assentiment est ma requête et l'accomplissement de Ses commandements ma vie. Ainsi, l'homme saute du cercle du raisonnable et du possible au non raisonnable divin et à la vie du royaume sur terre. Il entre dans cette vie que personne ne peut vivre à moins qu'il ne se repente et prie pour ses péchés avec des larmes et que la grâce ne descende sur lui pour rectifier sa route dans la direction de la vie du Christ, comme il la vécut lui-même sur la terre. C'est ainsi que l'homme cherche l'agrément de son Seigneur, et qu'il passe sa vie en criant: « Ô mon Dieu, donne-moi ton cœur afin que j'aime par lui, car mon cœur est impur et faible, sans équité et sans habileté à aimer, et je ne puis retrancher ma volonté et briser mon orgueil afin d'aimer».

 

 Référence :

Buisson Ardent. Cahiers Saint-Silouane l’Athonite. L’amour des ennemis. Le Sel de la Terre.