Saturday, October 31, 2020

On despondency, melancholy and despair.
Saint Sophrony l’Athonite.

 

The Old Rectory

26th January 1967

 

Dear Maria,







when we ourselves have become
 images of Him, 
we “overcome the world”







The peace and blessing of the Lord be upon you.

        Night has fallen long since. It is now late in the evening, and my working day is over. I have sat down to write you a letter, but I don't know how it will turn out, for I have little time, and yet I want to write about many things. First and fore­most I thank you for your letters, for your festal greetings, for all your long-suffering love. You know that I unfailingly think of you, particularly at midnight, or even later, depending on when I am free from my vain activities - and then I earnestly beg God to bless you then and to continue to bless you.

So, now I am trying not to leave anything out after such a long silence on my part.

Your despondency, melancholy, languor, must certainly visit you, as they visit each one of us.The main thing is how we take this. I think I have already told you in another letter that if we live our state only as our own, our soul is impoverished, and in the end becomes barren, and life becomes meaningless and unbearably wearisome. Our task, set before us by the Gospel, is to become universal persons, to bear in ourselves all the cosmos, to live in our life all the depth of the world's history, and above all of MAN. For all humanity is “I” and all history is my life. Each and every suffering, each and every joy, every experience, be it of love, enmity, joy, melan­choly, hope, despair; everything we go through, whether riches, poverty, hunger, satiety, fear, power, violence, humility, fighting, non-resistance, and all the rest, appear to us as rev­elations of what is happening in the world of men. Through our personal experience, which seems to us so small and so brief, we come to know Being in its potential fullness.

If we go along this path, reacting to everything in this manner, we are preparing ourselves to receive the Spirit of Christ, Who has shown us the image of the perfection of the sons of God, and when we ourselves have become images of Him, we “overcome the world”, we rise above the world's level, we become cosmic and even supra-cosmic - in the measure of our likeness to Christ. It is not within our power to seek out pain, suffering: it is natural for every living being to strive for joy, love, light. But taught of God, we are not terrified in the face of sufferings, because through them we too become en­riched with eternal knowledge, we assimilate all-embracing life. If we live in this way we also prepare ourselves for the experience of death, and we become capable of receiving our “better resurrection”. Of course, for us, at the centre of everything stands CHRIST, God and Man. Without Him we are in darkness; without Him we are incapable of coming to know where lies sin - that is, in distancing ourselves from the eternal Divine love of the Father. We should long ago have left behind us a naive understanding of sin. Sin is a break be­tween us and God, Who is absolute Light, absolute Knowl­edge, absolute Love. We cannot apply to Him anything that is not His attribute. If we want to be with Him and in Him, to be His true children, then we must be holy as He is holy. And if we are not such, then we lament over ourselves, we stand “on the threshold of despair”, in fear lest we lose for­ever our divine sonship and our abiding in infinite Light. But we do not go beyond this threshold. We reject utter despair. Thus, the life of God, even if not in its fulness, is preserved in us, and in one way or another we gain full victory. Love for Christ is the surest guarantee of our Resurrection. And you do love Him, so “the path of despondency is not for you”. I think it was St Seraphim who spoke these words a century and a half ago.

 

 

 

Reference:

Letters to his family. Archimandrite Sophrony(Sakharov).(2015)

 





Saturday, October 24, 2020

Ce Chrétien exceptionnel: Saint Sophrony l’Athonite.(3)
Archimandrite Nicholas Sacharov.

         

«le monachisme est
la pléni­tude de la vie»
         La relation, - tout tourne autour de ce concept. Si nous avons de bonnes relations, nous vivons comme si nous étions au paradis. Lorsque nos relations avec les autres sont offensantes, nous goûtons à l'obscurité de l'Enfer. La re­lation est quelque chose que nous avons hérité de Dieu: nous sommes capables d'aimer comme Dieu, de vivre comme Dieu, et de traiter les autres personnes comme Dieu le fait. C'est dans notre relation que l'image de Dieu se réa­lise. Toutes les relations, - que ce soit en famille, au travail, ou spécialement à l'église -, comportent l'amour, et où que soit l'amour, là se trouve l'image de Dieu en l'homme.

En nous tournant maintenant vers le monachisme, - j'entends le vrai monachisme-, c'est précisément cet amour pour les autres que les communautés religieuses sont destinées à réaliser par cette révélation de l'amour mutuel. En effet, dans le monachisme, cette image de Dieu, - l'amour en relation -, est d'une certaine manière mené à sa perfection, jusqu'à la plus extrême étendue possible. Nous sacrifions tout à la réalisation de ce but: apprendre à aimer. C'est pourquoi tous les vœux monas­tiques sont des vœux de renoncement à soi: renoncement à soi pour l'amour de Dieu et des autres. C'est l'autre, ce­lui que j'aime, mon frère et ma sœur, qui m'importe, pas moi, pas mon ego. Nous apprenons à nous oublier nous­-mêmes, jusqu'à déplacer toute notre at­tention vers les autres. C'est pourquoi l'amour implique toujours un sacrifice: plus le sacrifice est grand, plus l'amour est fort.

Ainsi, pour le Père Sophrony, le re­noncement et les vœux monastiques étaient non quelque chose de néga­tif et de pénible, mais le grand don et la joyeuse expression de l'amour. Dans une lettre à Balfour, le Père Sophrony affirme: «le monachisme est la pléni­tude de la vie.» Personne ne niera que le bonheur et le vrai sens de la vie se trouvent dans le service des autres. Ce mouvement, - se quitter soi-même pour aller vers les autres-, est le véritable fon­dement de l'existence. Cela signifie que la conversion existentielle vers l'Autre/ les autres (Jean 13, 34) constitue le vé­ritable fondement de l'être authentique.

Saturday, October 17, 2020

Ce Chrétien exceptionnel: Saint Sophrony l’Athonite.(2)
Archimandrite Nicholas Sacharov.

Saint Sophrony l'Athonite.
            En cela, Père Sophrony était très fort dans la ligne et dans l'atmosphère générale de la pensée russe. Fait remar­quable, Boris Pasternak, dans ces mêmes années 1920 en était arrivé à une conclu­sion semblable. Dans son célèbre roman, Docteur Jivaco, dont certains passages ont été écrits dans les années 1910 et 1920, il pose la question: quelle a été la contribution principale du christianisme à l'histoire de la civilisation? La réponse fut «la notion de personne». Avant le Christ, il y avait des masses anonymes de gens qui souffraient, mouraient et dont les noms s'étaient évanouis dans l'oubli. L'histoire de l'Empire romain en est un bon exemple. Mais alors le Christ vient:

Dieu s'est incarné; en une de ces pauvres petites personnes. Jésus de Nazareth, par son exemple, donne à chacun de ces pauvres petits un nom et une place dans l'histoire.

L'auteur, comme Jivago lui-même, était plus intéressé par la santé de la personne que par la bonne santé de la société. La censure soviétique considéra le roman comme anti-marxiste. Les points de vue politiques de Pasternak étaient contraire à ceux des autorités soviétiques qui refusèrent de le publier.

Ainsi, pour le Père Sophrony, toute personne ainsi révélée en Christ est plus précieuse que le cosmos tout entier. Cet axiome déterminera plus tard toute la vision de la vie spirituelle du Père Sophrony, ct spécialement celle de la vie monastique. Une attitude toute per­sonnellc face à Dieu et aux gens est sans doute la contribution la plus importante du Père Sophrony à la théologie et à la spiritualité orthodoxe.

Je suis entré au monastère en 1989 et j'ai été immédiatement frappé par l'at­mosphère assez inhabituelle de la com­munauté. Au lieu de la rigueur, de la discipline et de la sévérité monastique, le monastère rayonnait un esprit d'amour. Dans l'une de ses «paroles à la commu­nauté », le Père Sophrony a dit: «Si dans notre vie monastique nous n'apprenons pas l'amour, alors je ne sais pas quelle justification trouver au monachisme. » Ce principe était reflété dans la manière dont les membres de la communauté entretenaient leurs relations mutuelles. C'était une atmosphère quasi-familiale. Contraste: dans la conception russe, un monastère est très fortement associé à son lieu. Pour le Père Sophrony, cependant, le monastère était par-dessus tout, non un lieu, mais des gens.

Saturday, October 10, 2020

Ce Chrétien exceptionnel: Saint Sophrony l’Athonite.(1)
Archimandrite Nicholas Sacharov.

Saint Sophrony l'Athonite.

     Lorsque j'ai été invité à parler du Père Sophrony, - sur quelque aspect de sa vie ou de son œuvre, on m'a laissé le choix -, je me suis trouvé dans l'embarras: une heure, me disais-je, ne suffirait jamais pour présenter ne fût-ce qu'un aperçu général de ce qu'on pourrait dire à propos de ce chrétien exceptionnel, tout à la fois ascète, moine, théologien et pasteur.

Tout le monde sait qu'il est né en Russie à la fin du 19 siècle ; qu'après avoir abandonné une carrière artistique, il a passé vingt-deux ans au Mont-Athos Où il est devenu le disciple de saint Silouane l'Athonite; qu'après la Deuxième Guerre mondiale il est revenu en Europe et qu'en 1959 il a fondé ce qui est aujourd'hui connu comme le Monastère Saint- Jean- Baptiste, à Tolles­hunt Knights, dans l'Essex.

Je n'ai pas l'intention de creuser les profondeurs de la théologie du Père Sophrony. Je voudrais, au contraire, partager avec vous des expériences personnelles, des souvenirs, des rencontres. C'est précisément là, dans la rencontre personnelle, qu'on se révèle le plus pleinement soi-même. On peut le voir dans le Nouveau Testament: chaque rencontre personnelle du Christ est de­venue une partie de notre Évangile, de la bonne nouvelle du Salut. Il en va de même avec le Père Sophrony: son héritage est surtout constitué par les gens dont il a touché, transformé la vie. Et j'en suis, moi qui écris à présent.