Saturday, January 29, 2022

Trouve le moyen de sauver le monde.!!.
Saint Sophrony l’Athonite.

         



Saint Sophrony l'Athonite.

«Dieu, tu connais ma folie, et mes fautes ne te sont pas cachées» (Ps 68, 6). Maintenant, je vis dans un état de déchéance mais toi, Christ, tu m'appelles à croire et à accepter la révélation que le Père nous aime, comme il t'aime, toi, son Fils unique: «Le Père lui-même vous aime, parce que vous m'aimez. [ ... ] je ne prie pas pour eux seulement, mais aussi pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi, afin que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient en nous, afin que le monde croie que tu m'as envoyé [...] et que tu les as aimés comme tu m'as aimé» (Jn 16,27; 17,20-23).

Notre foi en Christ nous rend démesurément audacieux. Ce n'est pas pour rien que le bienheureux Paul dit que «la folie de Dieu est plus sage que les hommes». Ce qui semble pure folie pour l'entendement charnel est, pour les croyants, sagesse et force, vie et lumière (voir 1 Co 1, 18-30 ; 2, 14; 3, 18-19). 

Notre foi en Christ nous rend démesurément audacieux. Ce n'est pas pour rien que le bienheureux Paul dit que «la folie de Dieu est plus sage que les hommes». Ce qui semble pure folie pour l'entendement charnel est, pour les croyants, sagesse et force, vie et lumière (voir 1 Co 1, 18-30 ; 2, 14; 3, 18-19).

Or, si pour tout homme l'audace d'être chrétien est un acte qui dépasse la mesure humaine, que dirais-je de moi-même? Dès mon jeune âge, j'avais conscience de mon insignifiance; je manquais d'assurance, même devant les gens. Et pourtant... Une faible Lumière me visita, et je crus en Christ-Dieu. Puis, en vertu de ma foi, la Lumière se manifesta d'une manière plus abondante. Et ma foi s'enrichit d'une nouvelle connaissance.

Bien qu'en réalité je ne fusse «rien», la Lumière incréée m'apparaissait justement à cause de ma foi en Christ. Ainsi, mon intellect franchit la barrière de la raison, cette raison incapable de comprendre que la Personne (l'hypostase) divine est douée d'une connaissance qui englobe tout, au point que rien ne Lui est caché dans tout l'être cosmique: «Pas un seul passereau ne tombera au sol à l'insu de notre Père. Et nous donc! nos cheveux même sont tous comptés [ ... ] et rien n'est voilé qui ne sera révélé, rien de caché qui ne sera connu» (voir Mt 10,29-30 ; 26). «Aussi n'y a-t-il pas de créature qui reste invisible devant Lui, mais tout est nu et découvert à ses yeux» (He 4, 13).

Mes relations avec Dieu revêtent un caractère strictement personnel. La notion de péché n'a de sens qu'au sein d'une relation personnelle. En dehors d'elle, il n'y a pas d'amour entre l'homme et Dieu. En dehors d'elle, il n'y a pas et il ne peut y avoir de connaissance existentielle de Dieu. En dehors d'elle, tout est englouti par la mort, tout sombre littéralement dans le non-être.

Ce que je me propose d'écrire maintenant a eu lieu il y a plus d'un demi-siècle. C'était une période tendue; bien des choses, à vrai dire tout était confus pour moi. La vie est si brève, et Dieu si infiniment grand et lointain! Qui m'apprendra à aller vers Lui par la voie directe, afin de ne pas perdre de temps en errant sur des chemins étrangers? J'ai évidemment cherché l'homme ou les hommes qui pourraient m'aider, devenir mes guides. Cependant, une force jusqu'alors inconnue descendit sur moi - une prière que je ne pouvais interrompre ni de jour ni de nuit - et devint naturellement mon soutien de chaque instant. Il y eut des moments où la prière m'apportait des éclaircissements, et je crois qu'ils venaient de Dieu. Je citerai quelques exemples qui m'ont marqué et qui ont établi les fondements de ma vie.

Ne discernant pas la justice de Dieu dans les destinées de l'humanité et, en particulier, dans celle de chaque homme, je languissais dans les ténèbres de mon ignorance. J'étais semblable à un petit enfant, totalement privé de secours. Éprouvant le besoin de comprendre quelque chose, je devins impatient à cause des douleurs de mon âme. J'attendais l'aide de Dieu. Et le Seigneur eut pitié de mon ignorance. Il ne fut pas blessé par mon impudence, mais, telle une mère, Il eut compassion de moi et se hâta de me répondre. Cela se passa non pas une, mais de nombreuses fois. Dieu agit d'une manière semblable avec Job qui était cruellement éprouvé et qui exprimait impétueusement sa révolte.

Voici ce qui m'arriva une fois. Cela se passa en France dans les années vingt, avant mon départ pour l'Athos en 1925.

J'avais longtemps prié avec des pleurs: «Trouve le moyen de sauver le monde, car nous sommes corrompus et cruels.» Ma prière était particulièrement fervente pour «ces petits», pour les pauvres et les opprimés. Vers la fin de la nuit, alors que mes forces étaient épuisées, je perdis pour un moment la prière par suite d'une pensée: «Si moi je compatis tellement, de toutes les forces de mon âme, avec l'humanité, comment peut-on comprendre ce Dieu qui contemple avec indifférence les souffrances de millions d'hommes qu'Il a lui-même créés? Pourquoi permet-Il les innombrables actes de violence perpétrés dans le monde?»Je m'adressai donc à Lui avec cette question insensée: «Où es-tu? ..» En guise de réponse, j'entendis en mon coeur ces paroles: «Est-ce toi qui as été crucifié pour eux?» Ces paroles douces, prononcées par l'Esprit dans mon coeur, me bouleversèrent: le Crucifié me répondait en tant que Dieu.

Une réponse de Dieu, même brève, va d'habitude droit à l'essentiel. La parole divine apporte à l'âme une perception nouvelle, particulière, de l'être. Le coeur ressent l'effusion d'une vie pleine de lumière. L'intellect découvre soudain des significations jusqu'alors voilées. En nous effleurant, l'énergie créatrice de Dieu nous «recrée ». La connaissance acquise de cette manière ne ressemble pas à une intellection philosophique. En même temps que la perception des réalités du monde spirituel, un autre mode d'existence est conféré à l'être entier de l'homme: la connaissance de Dieu s'unit au courant de prière et d'amour pour Lui.

Dieu m'avait répondu brièvement, mais ses quelques mots contenaient une révélation extrêmement vaste et profonde. Essayons de trouver une analogie qui réponde aux besoins de notre raison. Dans notre état de chute, nous sommes séparés de Dieu comme par un léger voile, invisible mais en même temps impénétrable. D'une manière imprévue, sur un signe de Dieu, une déchirure se produit dans ce voile. En plaçant notre œil sur la déchirure, nous voyons non seulement ce pour quoi nous avons prié, mais, dans la même perspective, de vastes horizons s'ouvrent devant nous. Si notre œil est «sain» (Mt 6,22) et si nous le gardons fixé sur la vision qui nous a été donnée, il contemplera l'infini du Royaume lumineux. Alors, non seulement notre question, mais une série de questions annexes recevront une réponse satisfaisante ... Dans l'éternité divine, toutes les lignes parallèles ainsi que tous les rayons divergents convergent en un point.

 

Référence: La Prière, Expérience de l'éternité .Archimandrite Sophrony