Saint Sophrony avec le monastère Saint Jean-Baptiste. Essex. |
Que la joie d'attendre la venue du Jour sans Déclin du Christ ne vous
quitte pas, et que la véritable inspiration, qui n'est autre que l'Esprit Saint
lui-même, demeure constamment avec vous et vous enveloppe plus encore que
l'air terrestre. Ce souhait est d'autant plus ardent maintenant que dans le
monde entier naissent et se multiplient les «préhommes», des brutes trop
souvent incapables d'accepter la naissance donnée par l'Esprit, donnée d'en
haut: ils restent des «préhommes» jusqu'à la fin de leurs jours et sont privés
de la conscience d'être des fils de Dieu, incapables de dire comme il faut la
prière du Seigneur, le « Notre Père ...» Le monde
devient un zoo géant. Et nous devons constamment élever nos voix vers Dieu pour qu'Il envoie à
ce monde, qui périt dans l'étau du désespoir et de l'absence de sens, une
nouvelle révélation - ou plutôt de nouveaux miracles (pas d'ordre technique,
bien sûr), afin de réveiller la conscience de ces «préhommes» et qu'ils
naissent à une vie humaine authentique. Le Starets et beaucoup d'autres ascètes
ont prié pour le monde pendant des décennies, et cette prière est sans fin.
Mais le Christ a vaincu, et sa victoire demeure pour l'éternité.
Nous observons tous, non sans étonnement, la rapidité avec laquelle
l'humanité s'est mise à s'éloigner de l'Église, s'éloigner du Christ. Pour moi,
ce phénomène s'explique par le fait que depuis déjà plus d'un demi-siècle
(depuis 1914) la terre entière vit dans une atmosphère de lutte fratricide
incessante sans que personne ne se repente de ce péché. Dans cet état, il est
naturel que les gens n'osent pas regarder la grande Lumière du Christ. Croire
que nous tous sommes les enfants du Créateur Éternel du monde, ce qui est la
Bonne Nouvelle du Christ, croire en notre éternité promise par la résurrection
des morts, croire que l'homme est l'image du Dieu Vivant, c'est à présent
au-dessus de leurs forces: c'est pourquoi ce mouvement d'éloignement général
s'accélère et s'amplifie tant.
Quand j'étais en Grèce pendant la guerre et que je confessais, je
disais aux gens: «Vous avez oublié de me parler d'un grand péché ... - Lequel
? - De ce que vous êtes un meurtrier. .. - Non, je ne suis pas un meurtrier,
comment aurais-je pu vous parler de ce péché-là ? .. - Mais dites-moi, pendant
la guerre, quand vous appreniez que, lors de telle ou telle opération contre le
soi-disant ennemi, vous lui aviez causé de lourdes pertes, est-ce que vous
étiez content? - Bien sûr, ce Sont eux qui ont commencé la guerre, c'est leur
faute, c'est bien qu'on les batte. - Eh bien voilà, mon cher, on a beau
regarder cela du point de vue habituel, humain - sur le plan de l'Evangile vous
êtes moralement complice de meurtre et vous devez vous confesser de ce péché. »
Cela, d'après ce que je constate, les gens ne le comprennent pas comme
ils le devraient, et c'est pourquoi il ne leur reste plus qu'à refuser de vivre
selon l'Évangile, à s'éloigner du Christ, à oublier leur véritable origine
spirituelle et à se changer en animaux condamnés à mourir. Dans ces conditions,
édifier une église pour le Christ n'est vraiment pas chose facile.!!.
Mosaique de l'arche de Noé. Monastère Saint Jean-Baptiste. Essex. |
Référence:
Lettres
à des amis proches. Archimandrite Sophrony. Cerf(2013).