Saturday, November 14, 2015

Au sujet de Marthe de la ville de Saïdnaya.

La Sainte deux fois vierge Marie Mère de Dieu.
Que sa prière et sa bénédiction soient avec nous
dans les siècles des siècles, amen.

   Il était dans la ville de Saïdnaya une femme du nom de Marthe, très riche et élue.
   Un jour, elle songea qu'elle dissipait sa fortune en vain, comme le monde entier, et elle dit: "Quel profit pour moi, pour ma vie, ainsi que dit l'Évangile, si je gagne le monde entier et perds ma vie? Quel profit pour l'homme s'il ne donne (rien) en échange de sa vie?".
   Ayant médité ce propos, elle voulut faire le bien avec sa fortune et pesa longuement dans son cœur quelle œuvre était meilleure que toute (autre) bonne action.
   En cette heure, elle se remémora "qu'Abraham", l'ami de Dieu, avait été digne, en accueillant des étrangers, de recevoir la Trinité sainte dans sa maison.
   De même (en fut-il) également pour "Lot": grâce à son hospitalité, les deux archanges résidèrent dans sa maison".
   La sœur de "Lazare", "Marthe", aimait aussi beaucoup accueillir les pauvres; cette manière d'agir lui valut que sa maison devînt digne d'être le lieu de repos de Notre Seigneur lors de ses pérégrinations, le mois de la miséricorde et le jour du salut, ainsi qu'il est dit: Le Fils de Dieu sera appelé étranger.
   Comprenant dans son cœur que ces trois actions étaient belles entre toutes, elle fit construire une vaste hôtellerie.
   De ce jour, elle se mit à tenir grande et belle table comme un roi fait des noces pour son fils.
   Elle prépara aussi les noces célestes pour elle-même et, chaque jour, accueillait davantage de frères moines.
   Après qu'ils avaient mangé et bu, elle les interrogeait sur les choses divines et sur l'histoire des pères anciens.
   Un jour, des frères s'assemblèrent selon leur habitude pour demeurer dans sa maison.
   Elle-même les interrogea sur les choses utiles comme chaque jour.
La plus proche représentation de l'icône miraculeuse
de Notre Dame de Saïdnaya
   Ils lui racontèrent alors qu'il y avait à Jérusalem des gens peignant l'icône de Notre Dame, la sainte deux fois vierge Marie mère de Dieu.
   Par cette icône, tout ce qu'on demandait était fait: rien ne lui était impossible, comme au Fils tout-puissant de la Vierge.
   Entendant cela, le cœur de Marthe s'enflamma d'un ardent amour pour Notre Dame, la sainte deux fois vierge Marie mère de Dieu.
   Elle pria les frères avec des larmes et leur dit: "y a-t-il parmi vous quelqu'un qui aille à Jérusalem, que je lui donne beaucoup d'or avec quoi il achètera pour moi aux peintres l'icône de Marie ma Dame ?"
   Entendant les paroles d'amour pour la Vierge de cette femme, un moine dit : "Moi je vais y aller, je l'achèterai de mon propre or et je te l'apporterai.
   "Quand je serai revenu auprès de toi, je prendrai la quantité d'or dont j'aurai fait mon achat."
   Au moment même, Marthe embrassa ses pieds et lui fit beaucoup de recommandations.
   Levé le matin, le moine se mit en route et alla à Jérusalem. Y ayant vaqué à toutes ses affaires, il se souvint de ce que la femme lui avait confié d'acheter pour elle.
   Aussitôt il acheta une icône d'une beauté gracieuse.
   On dit que c'est "Luc l'évangéliste" qui avait peint cette icône.
   L'ayant prise, le moine la porta dans son sein et alla son chemin vers Saïdnaya.
   Alors qu'il faisait route, un lion rugissant se dressa pour le tuer. Le moine fut pris d'effroi et de tremblement devant l'aspect terrifiant du lion.
   Alors qu'il était dans l'effroi, l'icône cria et parla d'une voix très terrifiante - sept fois plus forte que le rugissement du lion.
   Aussitôt le lion s'enfuit en un clin d'œil, effrayé comme si un cavalier le poursuivait et le rejoignait pour le tuer.
   Le moine repartit en s'émerveillant d'avoir entendu la voix de l'icône.
   Comme des brigands coutumiers du meurtre et du vol l'entouraient, (il arriva) à nouveau (que), ainsi que nous l'avons dit précédemment, l'icône s'écria d'une grande voix - telle celle du tonnerre. Dans la grandeur de leur crainte, les brigands s'enfuirent sans comprendre d'où était venu ce cri.
   Quand le moine entendit et vit ces miracles qui stupéfient, il médita en son cœur.
Monastère de Notre Dame à Saïdnaya en Syrie.
   Il dit: "Je vais emporter l'icône dans mon pays l'Éthiopie, pour qu'elle me soit secourable, ainsi que je l'ai vue dans les deux miracles."
   Mais il ne savait pas que l'icône était venue par sa propre volonté pour demeurer avec la femme qui s'était éprise d'elle du fond de son cœur.
   Il s'imaginait au contraire qu'il l'avait acquise de son argent et l'avait emportée sans sa volonté, comme les autres objets que l'on vendait aux pèlerins.
   Il dit à cause de cela : "Je ne la donnerai pas à la femme ni ne prendrai le chemin de sa maison; je vais plutôt faire route vers mon pays."
   Alors qu'il méditait ainsi et délibérait en son cœur, il arriva au bord de la mer.
   Il trouva de nombreux bateaux, interrogea les marins et leur dit : "En quel lieu descendrez-vous à terre?". L'un lui dit: "Au pays de Saïdnaya." Le moine le quitta et n'alla pas avec lui.
   Un autre lui dit: "Je m'en vais par un autre endroit au pays d'Éthiopie."
   Le moine s'embarqua sur ce bateau. Alors que celui-ci parvenait au milieu de la mer, un vent de tempête se leva et le poussa, sans qu'il y pût rien, vers les atterrages de Saïdnaya.
   Le moine s'en alla par ce chemin et alla à la maison de Marthe en disant en son cœur : "Comment saurait-elle que c'est moi celui à qui elle a confié de lui acheter l'icône?". Et il entra dans la maison de Marthe et demeura avec les voyageurs.
   Le matin, il voulut sortir dehors avec ceux-ci pour aller son chemin. Il arriva avec les voyageurs à la porte de l'enceinte et ceux-ci sortirent. Mais ce moine ne put sortir, car le battant se ferma devant lui ; miracle de Notre Dame, la sainte deux fois vierge Marie mère de Dieu.
   Mais la porte de l'enceinte ne s'était pas changée pour les autres avant lui; elle était ouverte pour ceux qui sortaient et entraient.
   La coutume constante de Marthe était de prendre congé des voyageurs à la porte de l'enceinte en donnant à ceux qui n'en avaient pas un viatique pour les besoins de la route.
   Quand elle vit là le moine s'efforçant de sortir et ne le pouvant pas, elle lui dit: "Abbâ, je te vois l'apparence d'un homme malade; reste, demain tu t'en iras: ma maison est disposée pour héberger les voyageurs." Il dit oui.
   Le lendemain, quand il voulut de nouveau s'en aller, il ne le put pas davantage que la veille. La femme l'hébergea de nouveau. Le troisième jour, son habitude (d'essayer) de sortir ne le quitta pas, mais il ne put sortir. Quand Marthe vit qu'ainsi, trois jours durant, il ne se couchait pas comme un malade, ni ne s'en allait comme un homme en bonne santé, elle lui dit : "Quelle est cette chose qui t'arrive, Abbâ? Parle."
   Honteux, le moine ouvrit la bouche et dit à Marthe: "Ne me reconnais-tu pas, toi qui m'as confié (la tâche), quand je serais allé à Jérusalem, de t'apporter l'icône de Notre Dame, la sainte deux fois vierge Marie mère de Dieu ?".
   Elle lui dit: "Comment te reconnaîtrais-je: ils sont nombreux dans ma maison, ceux qui sortent et entrent ?".
L'emplacement de l'icône miraculeuse
au monastère de Notre Dame à Saïdnaya: "Chaghoura".
   Le moine lui narra alors tous les miracles qui s'étaient produits et tout ce qui lui était arrivé en chemin, depuis qu'il avait acheté l'icône jusqu'à ce jour.
   Ayant dit cela, il sortit l'icône de son sein et la donna à Marthe en disant : "Voici cette icône tout entière merveilleuse."
   Ayant entendu ce discours, Marthe se prosterna aux pieds du moine par amour pour la Vierge.
   Lui ayant pris l'icône des mains, elle se prosterna; telle la reine Hélène lors de l'invention de la croix de Notre Seigneur, elle s'écria d'allégresse si bien que tous, de loin et de près, s'assemblèrent en entendant cette clameur de Joie.
   Elle fit construire pour l'icône une belle maison, tel "Salomon" avait construit un sanctuaire pour le trône de Sion.
   Quant à l'icône elle-même, elle la disposa avec autant d'honneur qu'il était en son pouvoir.
   À sa droite et à sa gauche, elle laissa une lampe constamment allumée - que ce soit la nuit ou le jour.
   Elle se prosternait devant elle et la baisait au point de ne pas même s'en séparer pour se reposer.
   Chose absolument stupéfiante, plus que tous ses (autres) miracles: l'icône paraissait revêtue de chair, tels les Mages avaient trouvé et vu Marie dans la grotte avec son bien-aimé Fils.
   Il sortait d'elle larmes et sueur, et ceux qui en étaient oints étaient guéris de leurs maux (même les plus) graves.
   On apprit dans tous les confins du monde que cette icône de Notre Dame, la sainte deux fois vierge Marie mère de Dieu, était arrivée de Jérusalem à la ville de Saïdnaya, le pays de Marthe, le dix de "maskaram".
   Les patriarches instituèrent sous peine d'excommunication qu'on célébrât ce jour.

Que sa prière, sa bénédiction et la miséricorde de son bien-aimé Fils soient avec nous dans les siècles des siècles, amen.


Référence:
Colin G. (2004), Le livre éthiopien des Miracles de Marie, Patrimoine Christianifme, édition cerf, Paris, France.