Saturday, June 12, 2021

L'amour vit dans l'autre.!..
Saint Sophrony l’Athonite.

 

Icône de la Sainte Trinité. 

À la base de notre anthropologie chrétienne se trouve l'idée - révélée par le Dieu d'En-haut -, de la ressemblance à Dieu. L'idée de la ressemblance totale, et non partielle, à Dieu est à la base de notre anthropologie chrétienne. Dieu est supracosmique et l'homme, demeurant en Dieu, devient lui aussi supracosmique. L'homme porte en lui-même l'image et la ressemblance à l'Absolu, il porte en lui-même une conscience qui transcende tout ce qu'il voit dans les limites de l'existence terrestre. Le chrétien vit Dieu comme Père et comme Personne. Et lui-même, il se reconnaît comme personne­hypostase. Par la grâce que nous recevons de Dieu, nous savons à présent que l'Être absolu ne peut être que personnel. Car notre Dieu est un Dieu vivant, existant, et non pas une idée philosophique abstraite. Et l'homme-personne voit dans sa «personnalité» l'image-reflet de l'absoluité de Dieu, certes pas encore complètement réalisée, mais dont il est tout de même profondément conscient.

Entre Dieu et l'homme existe et doit exister une certaine commensurabilité [soïzmerimost '], malgré leur incommensurabilité [nesoïzmerimost ']. Si nous refusions cette révélation, toute vraie connaissance adéquate de l'Être Divin serait complètement impossible.

Nous parlons toujours d'un personnalisme chrétien. L'expression la plus parfaite de ce personnalisme chrétien se trouve dans le mouvement de l'amour qui embrasse tout par la prière. Dans l'acte de cet amour semblable à celui du Christ, le chrétien se donne sans réserve aux autres, aux aimés. Avant tout, à Dieu; et ensuite, par la force de l'Esprit, à tous les hommes. Dans cet amour kénotique, le chrétien se transcende lui-même. L'amour vit dans l'autre, non pas en soi-même, et ceux qu'il aime forment la vie du chrétien. Mais vivant dans l'autre, la personne-amour ne cesse pas d'être elle-même. Par cette sortie de ses limites égoïstes, l'amour arrive à la possession de tout, à l'unification de tout en soi. L'individualisme égoïste conduit inévitablement à l'isolement et engendre la division par la lutte pour son existence temporelle.

L'homme-hypostase, à l'image et à la ressemblance de l'Homme­Christ, devient dans son achèvement ultime, porteur de toute la plénitude et de l'Être Divin et de l'être créé. Autrement dit, il devient homme-dieu.

Dans la Sainte Trinité chaque Hypostase contient en elle-même toute la plénitude absolue des deux Autres, sans les abolir, ni les réduire au seul contenu de sa propre vie. De plus, chaque Hypostase entre totalement dans l'être des deux Autres, renforçant ainsi leur propre caractère hypostatique.

De la même façon, dans l'humanité plurihypostatique, chaque personne est appelée à contenir en elle-même toute la plénitude de l'être humain, sans éliminer d'aucune manière les autres hypostases, mais en entrant dans leur vie comme leur contenu substantiel, c'est-à-dire de leur vie. Par ce mouvement elle renforce aussi la personnalité des autres. De cette manière se forme un seul être, [à l'image de] ce qui est exprimé par le dogme de l'unique Essence en trois Hypostases [Divines]. L'humanité doit être une seule nature en une multitude d'hypostases. Telle est l'idée créatrice de Dieu qui a créé l'homme à Son image et ressemblance.

Le tout: ressembler à Dieu jusqu'à l'identité.

Dans la plénitude de la foi et par un long exploit ascétique, l'homme doit atteindre la ressemblance à Dieu, même jusqu'à l'identité. Il doit d'abord saisir, ensuite réaliser dans sa liberté le dessein prééternel du Créateur pour nous. Tel est le sens du commandement du Christ: « Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait» (Matthieu 5, 48).

Saint Sophrony l'Athonite.
     Si nous nous soustrayons à cet effort, - pour ne pas dire à cette crucifixion -, auquel est liée la réalisation en nous de la ressemblance à Dieu, nous héritons des ténèbres sépulcrales. Dans la liberté qui nous est donnée pour disposer de nous-mêmes, nous pouvons, certes, ignorer une vocation aussi élevée qui exige de nous toutes les forces de notre être. Mais il ne nous est pas permis de changer le dessein pré éternel de Dieu pour nous, d'abaisser notre nature au niveau des animaux, c'est-à-dire au niveau d'une existence temporelle en dehors de la lumière éternelle de la Divinité.  

La voie: la garde des commandements du Christ.

Par ces quelques brèves formules j'exprime l'essentiel de notre vie. On assimile cette vie par la garde des commandement du Christ. Avec son principe de l'obéissance, le monachisme rend l'homme capable d'embrasser tous les êtres humains dans son amour. Et nous devons garder cela dans notre monastère. Je prie tout le temps pour que chacun de nous ait pleine conscience du fait que cette petite famille est sa propre vie. Le succès, la souffrance ou la maladie de qui que ce soit d'entre nous, c'est effectivement notre succès ou notre maladie commune.

Le Seigneur a dit aux apôtres: « Ayez de l'amour entre vous, par ceci on reconnaîtra que vous êtes mes disciples» (cf Jean 13, 35). Comment comprendre ces paroles du Christ : «par ceci on reconnaîtra que vous êtes mes disciples» ? Personne, excepté le Christ, n'a parlé d'un tel amour; c'est Lui qui nous en a apporté la riche révélation.

Rappelons-nous donc ces paroles, et vivons selon elles. Et alors, nous, aussi modestes, petits et pauvres que nous soyons, nous deviendrons semblables aux apôtres des premiers temps. Cette vie est unique; depuis les temps de la venue du Christ sur la terre, elle se conserve jusqu'à présent par chaque personne qui veut comprendre le commandement de Dieu.

 

 

Référence:

Parole à la communauté. Pentecôte 2001. N*45.